Exposition à des pesticides : effets sur la santé

Les principales connaissances sur les effets aigus des pesticides sont issues d’observations rapportées chez des travailleurs et de cas d’intoxications documentés par les centres antipoison et de toxicovigilance. Les manifestations peuvent se limiter à des signes locaux : irritations cutanéo-muqueuses, réactions allergiques cutanées ou oculaires, vomissements, toux, gêne respiratoire ou traduire l’atteinte d’un ou plusieurs organes ou systèmes (système nerveux, foie, rein notamment).

Concernant les effets chroniques, des études épidémiologiques ont mis en évidence des liens entre l’exposition aux pesticides et le risque d’apparition de pathologies cancéreuses, neurologiques ou encore de troubles de la reproduction, en particulier en milieu professionnel. Si les études épidémiologiques menées chez des travailleurs exposés à des doses plus élevées, de façon plus fréquente, attestent du danger, l’estimation du risque pour la population générale ne peut pas être directement transposée de ces études en raison d’incertitudes sur les relations doses-réponse (des relations entre expositions et effet sur la santé). Certains pesticides possèdent aussi des effets perturbateurs endocriniens, qui ne dépendent pas de la dose.

En outre, des études épidémiologiques identifiées dans l’expertise collective de l’Inserm ont attiré l’attention sur les effets d’une exposition, même à faible intensité, au cours des périodes sensibles du développement (in utero et pendant l’enfance). Il est néanmoins difficile par le biais d’études épidémiologiques d’établir un lien de causalité entre l’exposition à une substance précise et l’apparition d’une maladie. Il demeure en effet complexe d’identifier précisément les substances auxquelles un individu a été exposé tout au long de sa vie et de prendre en compte les expositions cumulées à tous types de produit. Outre l’exposition à des substances chimiques (dont les pesticides), la population est potentiellement exposée à d’autres facteurs de risque de diverses pathologies (polluants atmosphériques, médicaments, tabac, alcool, rayonnements ultraviolets, déséquilibres alimentaires, stress psychologiques et socio-économiques…). Enfin, les susceptibilités individuelles, en particulier génétiques, doivent également être prises en compte dans l’expression des effets sanitaires en lien avec les pesticides.

Les répercussions sur la santé ont surtout été étudiées chez des travailleurs, exposés à des doses plus importantes. Ces résultats sont difficilement transposables aux expositions en population générale, toutefois, quelques études ont été consacrées aux expositions à des pesticides utilisés au domicile et à leurs effets. L’expertise de l’Inserm a rapporté des associations positives entre l’exposition professionnelle à des pesticides et certaines pathologies chez l’adulte comme la maladie de Parkinson, le cancer de la prostate et certains cancers hématopoïétiques (lymphome non hodgkinien, myélome multiple). Par ailleurs, les expositions intervenant au cours des périodes prénatale et périnatale, ainsi que lors de la petite enfance, semblent être particulièrement à risque pour le développement de l’enfant. Le ministère chargé de la santé, ainsi que les ministères chargés de l’environnement, de l’agriculture, de la recherche et du travail ont demandé à l’Inserm en avril 2018, en lien avec les autres institutions (Anses, SpF, INCa), d’actualiser l‘expertise collective de 2013 pour prendre en compte les nouvelles données et étudier les effets sur la santé non identifiés ou non analysés, faute d’études disponibles, ainsi que les effets sur la santé des populations vulnérables et riveraines des zones agricoles. Un premier rapport d’expertise est attendu pour le début de l’année 2020.

Dans le domaine des expositions professionnelles, l’étude de cohorte Agrican permet de suivre l’état de santé des agriculteurs et d’étudier les effets de certains pesticides, afin d’établir un lien entre l’utilisation de produits chimiques et la maladie. Elle est menée depuis 2005 par des chercheurs de l’Inserm, du centre François Baclesse et de l’Université de Caen, et porte sur 180 000 personnes réparties dans onze départements. Des premiers résultats de cette étude ont été publiés en 2014. Ils révèlent que certains cancers touchent davantage les agriculteurs que le reste de la population. De nouveaux résultats seront prochainement disponibles.

Enfin, s’agissant de la population générale et compte tenu du manque de connaissance sur l’exposition des riverains des zones agricoles et sur les potentiels effets associés, le ministère chargé de la santé a impulsé dès 2016 le lancement de deux études nationales, coordonnées par Santé Publique France, en lien avec l’Anses.